CUBANET

23 août, 2002



Quarante huit heures

Héctor Maseda, Grupo Decoro

LA HAVANE, août (www.cubanet.org) - Anna Rosa Veitía s'est sentie mourir ce matin-là. Les dernières nouvelles étaient mauvaises. Les palpitations de son cœur avaient augmenté et une légère douleur commençait à lacérer sa poitrine. Elle pressentait que quelque chose de terrible était arrivé à son mari. Elle se dirigea au balcon, mais ses jambes ne lui obéissaient pas. Et elle tomba au sol comme s'il s'agissait d'un poids lourd attiré vers le centre de la Terre.

Ernesto Roque, son mari, lui avait confessé qu'il irait comme journaliste indépendant à la localité de Güines pour couvrir les manifestations prévues par la dissidence locale pour commémorer les manifestations de rue qui avaient eu lieu le 5 août 1994. A cette occasion, des milliers de havanais s'étaient lancés à la rue dans les municipalités Centre Havane et la Vieille Havane, avec plusieurs incidents violents entre une partie du peuple et des membres de la police politique vêtues en civil et des groupes paramilitaires appartenant au Contingent Blas Roca. Il y eut plusieurs blessés graves et des centaines de personnes arrêtées, en majorité des adolescents.

En cette occasion, Ernesto Roque avait été intercepté par cinq agents de la Sûreté de l'Etat pour empêcher sa présence à la manifestation. Le lendemain matin des officiers de ce corps ont arrêté Roque, l'ont conduit dans leurs locaux où ils l'ont interrogé pendant 36 heures, et ensuite avait été libéré. Anna ne savait rien de ce qui s'était passé. Ils avaient convenu qu'il rentrerait le même jour dans l'après-midi.

Préoccupée, en voyant qu'il n'arrivait pas, Ana donna quelques coups de téléphone à Güines dans l'après-midi. De Roque on ne savait rien. Tous affirmaient qu'ils l'avaient vu pour la dernière fois le matin. De plus, Anna savait que la manifestation n'avait pas eu lieu. Son mari était parmi les participants. Heureusement, on lui indiqua qu'il n'y avait pas eu d'actes de violence.

Cette nuit-là elle ne dormit pas. La suivante non plus. En plus, ses trois enfants mineurs (13, 9 et 5 ans) avaient commencé à demander où était leur père. Elle évita les explications. Elle ne voulait pas les tromper. Sa préoccupation grandissait. Au milieu de ces pensées un nouveau jour la surprit. Roque n'arrivait pas. On était mardi 6 août.

Elle n'avait plus aucun doute : son mari était prisonnier du régime de Fidel Castro. Quelque chose d'inattendu fit que les nerfs explosent. Son fils Cristhiams, le plus petit des trois, endormi, a commencé à boire du lait à la bouteille, mais en se réveillant et en ne voyant pas son père il commença à pleurer, en exigeant que ce soit lui qui donne le lait comme il le faisait tous les jours. Anna éclata en sanglots.

A midi arriva chez Anna un opposant provenant de Güines. Les nouvelles qu'il apportait n'étaient pas bonnes. De Roque on n'a rien su à partir du dimanche matin. Tous les deux avaient été arrêtés par la police politique. A lui, on lui avait ordonné qu'il ne sorte pas de chez lui ce jour là. A Roque on avait exigé qu'il s'en aille de la localité immédiatement. Il supposait que Roque avait cherché refuge chez Jesús Hernández, un autre dissident de cette localité. Après quelques minutes, il appela Jesús lui-même et il parla avec Anna en lui demandant des informations sur Roque. Ce fut la goutte qui fit déborder le verre. Elle laissa tomber le téléphone comme s'il lui brûlait les mains et se laissa tomber dans un fauteuil. Elle se mit à pleurer. Plusieurs personnes présentes essayèrent de la calmer. Son cœur se mit à battre de façon irrégulière. Ils la couchèrent et appelèrent un médecin du voisinage qui s'occupa d'elle avec amabilité.

L'après-midi, allant un peu mieux, Anna donna plusieurs coups de fil pour dénoncer la disparition de son mari dans les médias de presse indépendants et les organisations qui s'occupent des droits de l'homme à Cuba. En même temps, la Commission Cubaine des Droits de l'Homme et de la Réconciliation Nationale lui donnèrent plusieurs numéros de téléphone officiels pour qu'elle demande des renseignements sur son mari. Les réponses des officiers du Département de la Sûreté de l'Etat, du Département Technique d'Investigations et de la Direction Nationale de la Police fut la même : "Nous n'avons aucune nouvelle d'Ernesto Roque".

Cette nuit là, seule et désespérée, Anna se mit à réfléchir sur les disparitions qui avaient eu lieu quelques dizaines d'années auparavant dans plusieurs nations latino-américaines effectuées par des dictatures militaires. Les opposants politiques de ces régimes étaient séquestrés par des agents de police. Les familles des victimes ne surent plus rien de ces personnes. Anna craignait que quelque chose de semblable arrive à son époux. Ce fut alors qu'ont augmenté ses battements de cœur, elle a senti une douleur dans la poitrine et a essayé d'arriver au balcon pour prendre un peu d'air, mais elle s'est évanouie. C'était pendant les premières heures du mercredi 7 août.

Ce furent ses enfants et une tante de passage chez elle qui la ramassèrent évanouie et l'emmenèrent à l'hôpital. Le diagnostique fut : "Tension artérielle très élevée et une tension émotionnelle qui pourrait l'amener au bord de l'infarctus si on ne la contrôle pas". Ils lui donnèrent un médicament et elle s'endormit. Au matin elle rentra chez elle.

Heureusement, et contrairement au cauchemar en temps réel qu'a vécu Anna, son expérience amère se termina vers midi. Roque, comme par enchantement, apparut à la porte de la maison. Il rentra sale, maigri, mais vivant. Il arriva accompagné de trois dissidents de Güines.

Anna ne voulait pas croire ce qu'elle voyait. Elle s'est approchée et a commencé à toucher son mari jusqu'à se convaincre que c'était réel. Là se trouvait Roque ! Immédiatement ils s'embrassèrent, et leurs trois enfants s'unirent à eux. Personne ne dit rien. Ce n'était pas nécessaire.

Les personnes présentes crurent voir un halo doré autour d'une si belle image. Sans aucun doute, la mysticité de l'amour régnait à ce moment là, qui s'imposait au-dessus de ce qui était arrivé pendant les 48 dernières heures.

Traduction: Genevieve Tejera

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