Lettre ouverte
à James Carter
LA HAVANE, le 16 mai (Reinaldo Cosano Alén) Cher Monsieur
Carter :
Il serait lamentable, puisque vous nous honorez avec votre présence
dans notre Patrie, que vous vous en alliez sans lopportunité davoir
une vision beaucoup plus large de la réalité cubaine que celle quon
vous a sûrement présentée jusquà présent.
Nous comprenons que votre programme serré pour ces jours bien courts
de séjour à Cuba ne vous permettent pas de disposer de tout le
temps nécessaire pour connaître de près toutes les facettes
de la complexe situation politique, économique et sociale que vit aujourdhui
le peuple cubain.
Pour cela nous avons prétendu, depuis notre modeste position de
lutteurs pour la démocratie et connaissant votre illustre condition de démocrate
et paradigme de la démocratie, vous faire connaître la vie et les
objectifs dune partie généralement moins connue, bien que
majoritaire, de lopposition cubaine.
Dans les prisons cubaines on garde injustement et arbitrairement pour des
motifs politiques des centaines de frères et compatriotes. Parmi eux, et
comme résultat de la plus récente vague répressive des
autorités contre les opposants pacifiques, dix activistes et membres de
la Fondation Cubaine des Droits de lHomme, avec à leur tête
leur leader lavocat aveugle Juan Carlos González Leyva, qui
attendent depuis le 4 mars dernier dêtre condamnés par un
tribunal à de longues années dinternement, après
avoir effectué une manifestation de protestation civique dans la province
de Ciego de Ávila contre les abus du gouvernement castriste.
Onze autres défenseurs actifs des droits de lhomme,
quelques-uns dentre eux leaders dorganisations et partis dopposition,
comme le président du Mouvement 24 de febrero, Leonardo Bruzón Ávila,
sont des prisonniers politiques victimes de lintolérance officielle
du régime de La Havane, pour avoir effectué des manifestations
publiques contestataires et pacifiques.
Aucun de ces frères ne sera jugé pour prétendre à
des changements sociaux et politiques selon des formules basées sur des
lois castristes, même celles qui sont constitutionnelles, préparées
par un régime qui a eu le soin de NE PERMETTRE AUCUNE OUVERTURE LEGALE,
bien quil sefforce de démontrer que cela existe, mais sans
aucun doute impraticable et impossible.
Les opposants que nous avons mentionnés ont été les
fondateurs de la vie civile indépendante. Dans des endroits distants de
la géographie insulaire ils ont fait grandir notre société
civile, en créant partout des bibliothèques et agences de presse
alternatives et, en leur temps, ont abandonné lidée infortunée
de chercher une voie vers la démocratie dans une ouverture légale
dun gouvernement qui na même pas pendant tant dannées
de requêtes en suivant les lois établies, accepté de reconnaître
légalement une seule association contestataire.
Comme eux, nous sommes nombreux ceux qui à Cuba et dans lexil fécond
avons la certitude quune voie effective pour affaiblir ce régime et
atteindre la vraie démocratie, est la promotion dactions de résistance
civique, même si elles sont pacifiques, qui mobilisent de larges secteurs,
ainsi quen dénonçant dans des réunions
internationales, des organisations et gouvernements du monde libre, les
flagrantes violations des droits de lhomme du peuple cubain.
Pour ces raisons nous avons peur que vous, Mr. Carter, dans votre désir
bien intentionné daider notre peuple dans son chemin vers la liberté,
et en appréciant les nuances de votre parcours bref et limité dans
le spectre politique alternatif cubain, mené sans que vous vous en
rendiez compte pour vous inroduire dans une posture irréelle qui dénature
la réalité de lopposition et de la société
civile cubaine, en ignorant les positions dun secteur large et majoritaire
de celle-ci.
Permettez mois de vous rappeler, parmi tant dautres cubains dignes,
les auteurs du document "La Patrie appartient à tous", et que
le mot "TOUS" devrait signifier, quil inclue le peuple, lopposition
et la société civile. Précisément pour en être
les auteurs et pour lavoir diffusé, ces dignes cubains ont été
des prisonniers politiques, comme également le médecin Oscar Elías
Biscet, encore incarcéré dans une des prisons de Castro pour avoir
participé à des actes civiques de résistance.
Pourquoi tout parier sur un seul cheval qui na jamais gagné de
course, ou encore pire, qui a déjà perdu sa course ? Il faut se
souvenir que cette même tentative, les mêmes méthodes et les
même objectifs ont été bafoués par le gouvernement en
1996, pendant les jours glorieux de Concilio Cubano.
Il ne faut pas tenir compte seulement des points de vue dun secteur
modéré et socialiste de la dissidence. Il en existe un autre
beaucoup plus large, majoritaire et radical, qui présente des initiatives
daction civique et contestataire pro démocratie, comme la
PLATEFORME DE
RESISTANCE CIVIQUE DE LOPPOSITION, qui ont des positions communes et
viables dorganisations à Cuba et dans lexil, avec lobjectif
de réanimer lactivisme pour la démocratie, pour le développement
de la société civile par la stimulation dactions de résistance
civique et désobéissance, et favorisant la promotion de projets
comme le Projet de Bibliothèques Démocratiques Indépendantes,
lAssemblée pour Promouvoir la Société Civile à
Cuba, parmi dautres.
Nous aspirons à arriver à la dérogation de la
Constitution Communiste de 1976, le Code Pénal, la soi-disant Loi de la
Protection de la Souveraineté Nationale et de lEconomie de Cuba
(Loi Bâillon) et autres instruments apparemment légaux qui prétendent
ingénument utiliser dautres concitoyens pour faire tomber le régime.
Nous voulons former un Comité de Représentation dOpposition
Nationale, qui garantisse léchange entre la plus grande partie
possible du spectre politique alternatif cubain et des personnalités,
organisations et institutions du monde libre, avec la perspective de favoriser
le rapprochement entre les Cubains de lintérieur et à lextérieur
de lIle, ainsi que le contact direct entre le peuple cubain et celui des
pays qui font partie de la communauté démocratique internationale.
Que notre message arrive jusquà vous, avec le désir que
vous continuiez à jouir dune excellente santé comme jusquà
présent, avec laide de Dieu, et que vous ayez beaucoup de succès
dans vos buts louables.
Salutations cordiales:
Professeur Reinaldo Cosano Alén, Président (P.S:R) de la
Fondation Cubaine de Droits de lHomme et Président de la Coalition
Démocratique Cubaine.
Traduction: Genevieve Tejera
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