CUBANET

MARS 12, 1999


Entretien avec le docteur Oscar Elías Biscet

par Angel Pablo Polanco, Coopérative de Journalistes Indépendants

LA HAVANE, le 12 mars - Le docteur Oscar Elías Biscet González est l'adhérent principal du conseil directeur de la Fondation Lawton pour les Droits de l'Homme, une organisation cubaine pacifiste, dont le but principal est la défense du droit à la vie. En accord avec cet objectif, ses adhérent sont contre l'avortement, la peine de mort et l'euthanasie.

Dans le sens le plus large ses desseins, c'est une organisation respectueuse du droit civil, qui défend les droits de l'homme en général, et ses intégrants basent leur lutte sur la méthode de la désobéissance civile. Le 22 février dernier, deux de ses adhérents ont effectué une manifestation pacifique en face de l'hôpital marterno-infantile où le docteur Biscet avait travaillé comme médecin jusqu'à son expulsion de ce centre de travail à cause de sa position face à l'avortement et des activités qu'il réalisait à ce sujet.

Ce jour-là, avec Migdalia Rosado, aussi adhérente de la Fondation Lawton, il fut battu brutalement, incarcéré et accusé de délit de désordre public. De façon inespérée, il fut mis en liberté mardi dernier, quelques heures avant le procès prévu pour mercredi, et a aimablement accepté cette interview.

Docteur Biscet, pourriez-vous nous dire les buts de la manifestation du 22 février, et donner des détails, peut-être inédits de ce qui se passa ce jour-là ?

OEB: Le 22 février nous nous sommes donnés rendez-vous en face de Filles de Galicia, l'hôpital materno-infantile de la municipalité 10 de Octubre, qui se trouve à Luyanó, pour honorer la mémoire de quatre jeunes pilotes de Frères à la Rescousse assassinés par le gouvernement castriste, et les milliers de victimes qui sont assassinées dans les hôpitaux de maternité du pays, desquels nous avons comme exemple ce même hôpital Filles de Galicien. Nous avons pu vérifier, avec le témoignage des mères, que dans cet endroit ils ont assassiné sept enfants qui sont nés vivants et furent assassinés. Quelques uns ont été noyés dans l'eau, d'autres avec du papier, et d'autres en leur coupant le cordon ombilical et les laissant perdre le sang.

Nous avons fait cette manifestation parce que nous disons que la vie et la liberté est l'essence de Dieu dans l'homme, et pour cette raison nous luttons pour que ces principes soient respectés et soient intégrés à la société cubaine, pour que nous éradiquions la violence sociale. Toutefois nous devons commencer à éradiquer la violence personnelle, pour pouvoir éradiquer la violence nationale, et ensuite la violence qui existe dans le monde entier. Si nous ne commençons pas par nous-mêmes, pour l'individu, nous ne pourrons jamais en terminer avec la violence. C'est pour cela que nous avons effectué cette manifestation, pour soutenir ces principes.

APP: Docteur, nous croyons savoir que la foule vous a donné des coups pendant cette manifestation. Vous pourriez nous dire quels ont été vos sentiments á ce moment-là, en voyant cette agression brutale à votre égard ?

OEB: Ce jour-lá, Migdalia Rosado et moi étions en face de hôpital avec plusieurs pancartes, quelques unes desquelles portaient des photos des jeunes assassinés et des inscriptions qui disaient "Activistes des droits de l'homme assassinés le 24 février 1996". Une autre pancarte disait "En mémoire de ces frères et de leur oeuvre humanitaire". D'autres disaient "Non à l'avortement, un crime contre l'humanité", "Avortement, assassinat d'enfants", "Non à la peine de mort" et "justice".

Nous étions assis et la foule du Parti Communiste est venue, avec en tête la directrice de hôpital, le docteur Laura Fernández Fernández et le docteur Nauma Silva Leal. Ils nous ont arraché violemment les pancartes et ont commencé à nous donner des coups. En réalité c'était dirigé par le G-2, c'est-à-dire la police politique.

Mon sentiment envers ces personnes à ce moment-là fut qu'elles sont victimaires maintenant, mais sont seulement victimes du système qui me frappait brutalement, mais en vérité je n'ai pas senti de haine envers eux pour leur qualité de victimes. Je pense qu'un jour viendra où ils se repentiront du mal qu'il m'ont fait à moi et à Migdalia, mais je n'ai aucune rancoeur envers aucun d'eux.

APP: Docteur, nous voudrions que vous nous expliquiez la manière avec laquelle la police politique vous fit savoir que vous étiez libre, et quel motif y eut-il pour cette décision inattendue.

OEB: Bien, après avoir été enfermé 16 jours dans une cellule murée, une cellule de châtiment, ils me prévinrent que j'avais une visite. Il s'agissait de l'avocat que mon épouse avait retenu pour qu'il me défende au procès. Ce fut une grand joie, puisque au moins je savais ce qu'ils allaient faire avec moi, c'est-à-dire, que le lendemain le procès allait commencer.

Cependant, environ quinze minutes après avoir terminé de parler avec mon avocat, ils m'ont fait sortir de nouveau de la cellule et m'ont transféré de la caserne de 100 et Aldabó à une maison aux environs de la ville, où des membres de la police politique me communiquèrent que je n'allais pas être jugé, que j'allais être mis en liberté, mais que ce n'était pas parce qu'ils étaient bienveillants, à quoi je répondis qu'il n'avaient pas besoin de le clarifier, puisque je les connaissais bien.

Ce fut également une surprise pour moi, parce que nous avons fait cette manifestation en pensant qu'on allait nous condamner à 30 ans de prison, mais nous avions décidé que nous ne laisserions pas mourir cette petite flamme de liberté qui s'est allumée parmi le peuple cubain, qu'au contraire il fallait la maintenir. Nous avons décidé de mener à bien cette action puisqu'elle était programmée depuis quelques mois et nous pensions qu'il fallait réaliser ce qui avait été projeté. Dans ce cas, comme beaucoup d'autres personnes avaient peur et pensaient laisser ce labeur, nous avons décidé de montrer l'exemple pour continuer la lutte malgré les lois arbitraires qui existent. Nous ne devons pas nous y soumettre et devons exiger, par la lutte civique non violente, que ce genre de procédé arbitraire cesse.

APP: Pendant son incarcération, des faits importants ont eu lieu, comme le procès contre les signataires du document La Patrie appartient à Tous, et la détention de plus de cent journalistes indépendants et opposants pacifiques. J'aimerais que vous nous racontiez si étant en prison vous avez reçu des renseignements sur ces faits.

OEB: Eh bien, étant en prison vous savez qu'il ne permettent pas d'y recevoir des journaux. Ce sont des mesures arbitraires. Même les gouvernants de ce pays, quand ils étaient en prison pendant leur lutte, de cela il y a 40 ans, ils avaient la permission d'avoir des livres et même de faire la cuisine dans leur cellule, ce qui ne nous est pas permis, ce qui rend évident que nous sommes dans des conditions infra humaines. Bien qu'ils disent qu'ils s'en tiennent aux droits de l'homme, ils violent tous nos droits, même en prison, dans cet endroit aussi écarté que sont les cellules murées de 100 et Aldabó.

J'ai eu la chance qu'un prisonnier qui venait de la rue a été placé dans ma cellule, et m'a raconté qu'ils avaient fait un procès aux quatre de La Patrie appartient à Tous. Et aussi quelque chose qui fut une grand surprise pour moi et qui me produisit une grande émotion, fut que cette même personne me raconta: que les Frères à la Rescousse avaient lancé sur la ville des milliers de bulletins et que quelques uns étaient tombés à 100 et Aldabó. Ceci me donna une grande joie et de la force pour continuer à résister en prison.

APP: La Loi de Protection de l'Indépendance Nationale et de l'Economie de Cuba sera mise en vigueur prochainement. Quelle est votre opinion sur la loi, et la position de la Fondation Lawton des Droits de l'Homme en relation avec elle ?

OEB: La majeure partie des lois décrétées par le gouvernement communiste de Cuba sont des lois arbitraires, principalement cette dernière, qui méprise et supprime tous les droits que possède l'être humain pour s'exprimer; elle limite complètement les libertés de l'individu et démontre une fois de plus que c'est un régime brutal qui depuis 40 ans viole les droits du peuple cubain.

Mon opinion est que nous ne devons pas y obéir et continuer à lutter pour arriver à la vraie indépendance. Le prêtre Félix Varela disait que l'indépendance et la liberté nationale sont filles de la liberté individuelle. Cette liberté individuelle c'est le respect des droits de l'homme. Tandis qu'il n'y a pas de respect pour les droits de l'homme, une nation n'existe pas véritablement.

APP: Docteur Biscet, nous vous sommes reconnaissants pour cet entretien. Vous désirez ajouter quelque chose sur la situation actuelle du pays ?

OEB: Je voudrais ajouter que nous invitons toute l'opposition, tous les activistes des droits de l'homme, tous les dissidents, tous ceux qui veulent lutter pour l'établissement à Cuba d'un régime de droit, à s'unir à nous dans cette lutte par l'intermédiaire de la désobéissance civile non violente.


Traduction: Genevieve Tejera

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